Soeurs : les bonnes intentions

Sur le papier, Soeurs de Yamina Benguigui apparaît comme le parfait projet à défendre : féminisme et sororité en avant, accusation de la masculinité toxique, recherche des origines, magnifique distribution (Isabelle Adjani, Maïwenn, Rachida Brakni, Hafsia Herzi, Or de l’écrit à l’écran, une distance s’installe ; un grain de sable vient gripper cette mécanique huilée ; tout ne paraît pas si évident. Comment expliquer que ce qui pouvait donner un bon film ne donne finalement rien à l’arrivée? Les bonnes intentions ne suffisent pas malheureusement.

Le principal problème de Soeurs, c’est qu’il ploie sous le poids de bonnes intentions, des intentions tellement présentes qu’elles finissent par envahir l’écran, au détriment de l’intrigue et de l’émotion

Depuis trente ans, trois sœurs franco-algériennes, Zorah, Nohra et Djamila vivent dans l’espoir de retrouver leur frère Rheda, enlevé par leur père et caché en Algérie. Alors qu’elles apprennent que ce père est mourant, elles décident de partir toutes les trois le retrouver en Algérie dans l’espoir qu’il leur révèle où est leur frère. Commence alors pour Zorah et ses sœurs une course contre la montre dans une Algérie où se lève le vent de la révolution.

Le principal problème de Soeurs, c’est qu’il ploie sous le poids de bonnes intentions, toutes celles qui ont été énumérées plus haut. Les intentions sont tellement présentes qu’elles finissent par envahir l’écran, au détriment de l’intrigue et de l’émotion. Dans ce film de femmes réalisé par une femme, tout paraît malheureusement prévisible et extrêmement surjoué, avec des dialogues sonnant assez faux. Les différentes couches narratives (flash-back sur le passé en Algérie, mise en abyme de répétitions théâtrales qui voudraient évoquer Jacques Rivette, sans s’en approcher un tant soit peu), destinées à apporter de la complexité et de la densité au film, finissent par apparaître totalement superfétatoires.

Reste l’énorme atout du film sa distribution. Si en effet l’aspect le plus intéressant du film réside dans le renvoi de l’acteur (l’actrice surtout ici en l’occurence) vers sa biographie personnelle, ce qui est particulièrement prégnant pour Isabelle Adjani ou Maïwenn. Il serait d’ailleurs assez intéressant de comparer ce film à ADN de Maïwenn, sans doute injustement critiqué, pour s’apercevoir de la différence entre un scénario planifié et peu ouvert au réel et une mise en scène qui s’approprie tout fragment de réalité pour faire feu de tout bois. C’est surtout lors des flash-backs où Hafsia Herzi (toujours remarquable) en vient à affronter un mari, tyran domestique, Rachid Djaidani (impressionnant) que le réel impose sa loi et que l’on finit par oublier que l’on voit un film, ce qui n’arrive tristement presque jamais lorsqu’on regarde Soeurs.

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RÉALISATEUR : Yamina Benguigui  
NATIONALITÉ : française, algérienne 
AVEC : Isabelle Adjani, Maiwenn, Rachida Brakni, Hafsia Herzi 
GENRE : Drame 
DURÉE : 1h35 
DISTRIBUTEUR : Jour2Fête
SORTIE LE 30 juin 2021